Séminaire sur la modernisation à la chinoise et le développement de l’Afrique : Une communication inaugurale de Xue Bing sur la politique africaine de la Chine

Héribert-Label Elisée ADJOVI / Envoyé spécial à Xi’an 30-07-2025
Ce séminaire à Xi’an a mis en lumière la pensée chino et son approche partenariale avec l’Afrique. Depuis 1949, les relations sino-africaines ont évolué d’un soutien idéologique vers une coopération économique, éducative et technologique approfondie. En 2025, ce partenariat atteint des records avec 300 milliards $ d’échanges commerciaux, des projets d’infrastructures majeurs et un soutien diplomatique renforcé.
Les 50 experts africains participants au séminaire sur « La modernisation à la chinoise et le développement de l’Afrique » ont suivi une communication inaugurale de Monsieur Xue Bing sur les fondamentaux de la politique étrangère de la Chine en général et la politique africaine de la Chine en particulier. Avant la série de conférences animées par des professeurs émérites chinois.
Le maître-mot de la mise en œuvre de la politique étrangère chinoise a toujours été “le pacifisme”. Une vision de politique étrangère qui tire ses origines profondes de la civilisation plurimillénaire chinoise et dirigée par la pensée du Président Xi Jinping. Une voie de développement pacifique qui met en harmonie l’homme et la nature.
En cela, la diplomatie chinoise conçoit qu’aucune civilisation n’est au-dessus des autres et que, tout en ayant la terre en partage, il est normal que les acteurs de la société internationale aient des points de divergence. Raison pour laquelle, même lorsqu’elle faisait partie des puissants du monde dans le passé, la Chine n’a jamais eu de colonie.
En permanence guidée par l’esprit de paix et du respect de l’indépendance et de la souveraineté des Etats, elle continue d’œuvrer pour un monde multipolaire où les uns et les autres s’enrichissent mutuellement de leurs expériences, afin de construire une communauté d’avenir partagé pour l’humanité.
Ceci, dans la dynamique de la pensée du Président Xi Jinping pour un nouvel ordre mondial marqué par le développement global, la sécurité globale et la civilisation globale. Mais, il n’est pas possible d’asseoir une société internationale de paix et de sécurité, sans tenir compte de la légitime aspiration des pays en développement à choisir leur propre voie de développement. C’est dans cette logique que s’inscrit la proximité permanente de la Chine aux côtés des pays du Sud global en général, et des pays africains en particulier.
La Chine-Afrique : plusieurs étapes, même ambition
Plusieurs étapes ont marqué la Chine-Afrique depuis la fondation de la République Populaire de Chine, proclamée par le Président Mao Zedong, le 1er octobre 1949. Entre 1949 et 1978, la Chine et l’Afrique ont renforcé leur amitié traditionnelle et combattu ensemble contre le colonialisme et pour la libération des nations africaines, avec la conférence de Bandung – qui s’est tenue du 18 au 24 avril 1955 à Bandung, ville indonésienne, réunissant pour la première fois les représentants de vingt-neuf pays africains et asiatiques – comme point d’ancrage. Cela a permis, à la fois, le « Soleil des indépendances » en Afrique à l’orée des années 1960 et le rétablissement de la République Populaire de Chine – au terme de la Résolution 2758 de l’Assemblée générale de l’ONU adoptée le 25 octobre 1971 avec 76 voix pour, 35 contre et 17 abstentions – comme le seul représentant légitime de la Chine auprès de l’ONU. Vingt-six Etats africains faisaient partie du Groupe des pays membres de l’ONU ayant soutenu la réintégration de la Chine, qui retrouve, par voie de conséquence, son siège de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU avec droit de veto.
A ce sujet, le Président Mao Zedong dira que, “Ce sont nos frères africains qui nous ont portés aux Nations Unies”. Depuis lors, la Chine considère cette solidarité comme un acte fondateur de l’amitié sino-africaine. Cette période a été également marquée, en 1962, par la tournée africaine de 52 jours du Premier ministre chinois Zhou Enlai, dans dix pays africains. A cette même époque, malgré qu’elle traverse, elle-même, une décennie de révolution culturelle désastreuse (1966-1976), la Chine a tendu la main aux pays Africains.
L’un des plus grands projets d’aide internationale jamais entrepris par la Chine en Afrique dans les années 1970 est le chemin de fer Tanzanie-Zambie (TAZARA), une ligne de 1860 kilomètres reliant Dar-es-Salaam en Tanzanie à Kapiri Mposhi en Zambie. Après le rétablissement des relations diplomatiques entre la République Populaire de Chine et la République Populaire du Bénin, le 29 décembre 1972, le Bénin a bénéficié du don chinois d’un milliard de Francs CFA, pour la construction du Stade de l’Amitié, achevée en novembre 1982.
La période 1978-2000 marque une transition stratégique dans les relations entre la Chine et l’Afrique, passant d’un engagement principalement idéologique à une approche plus économique et pragmatique. A partir de 1978, avec la politique de réformes impulsée par le Président Deng Xiaoping, la Chine adopte une politique d’ouverture axée sur le développement économique.
La période 2001-2012 s’inscrit dans une phase d’expansion stratégique, marquée par l’institutionnalisation du partenariat à travers le Forum sur la Coopération Sino-Africaine (FOCAC) – créé en octobre 2000, avec le premier sommet du Forum tenu en 2006 – et une intensification des échanges économiques, diplomatiques et technologiques. Tout ceci, sur la base des principes d’égalité, de résultats mutuellement bénéfiques, d’amitié et de bonne foi et l’élaboration d’un Document de politique étrangère de la Chine envers l’Afrique.
L’avènement du Président Xi Jinping et la Chine-Afrique de la nouvelle ère
L’année 2013 est une année spéciale, parce que marquée par l’avènement du Président Xi jinping, qui a réservé sa première visite à l’étranger à l’Afrique. A cette occasion, il a posé les fondations d’une nouvelle ère dans les relations sino-africaines, en les plaçant sous le quadruple signe : « sincérité, pragmatisme, amitié et franchise. » En septembre 2018, lors du FOCAC à Beijing, la co-présidence du Sommet était assurée par Xi Jinping, fraîchement réélu Président chinois en mars 2018 et Cyril Ramaphosa, nouvellement élu Président Sud-africain. Leur collaboration symbolisait un renforcement du partenariat sino-africain, avec une volonté commune de bâtir une communauté de destin Chine-Afrique plus solide.
En novembre 2021 et en dépit de la crise du Covid, la huitième réunion ministérielle sino-africaine a pu avoir lieu, avec la participation du Président Xi Jnping par vidéo-conférence et fut marquée par une volonté de relancer les relations dans un monde post-crise.
Avec le soutien de la Chine, le quinzième Sommet des BRICS – qui s’est tenue à Johannesburg en Afrique du Sud, du 22 au 24 août 2023 – était l’occasion d’échanges sur le partenariat BRICS-Afrique pour une croissance mutuellement accélérée, un développement durable et un multilatéralisme inclusif. Ce sommet a permis l’entrée de l’Egypte et de l’Ethiopie dans les BRICS. En marge de ce sommet, le Président Xi Jinping a annoncé trois nouvelles mesures en faveur de l’industrialisation, de la mécanisation agricole et de la formation professionnelle en Afrique. Des mesures réitérées et adoptées à l’issue du neuvième Sommet du FOCAC, qui a eu lieu du 4 au 6 septembre 2024 à Beijing. Un sommet qui marque la consolidation de l’amitié sino-africaine, passée de relation de coopération à partenariat stratégique.
En juin 2025, la réunion ministérielle de mise en œuvre des actions de suivi du FOCAC a eu lieu à Changsha dans la province chinoise du Hunan. En parallèle, la quatrième Exposition économique et commerciale Chine-Afrique a célébré l’excellence du climat des affaires sino-africaines, dans un contexte de guerre de taxes douanières unilatéralement imposée par Washington.
Chine-Afrique : Des chiffres qui parlent plus que des mots
Pour illustrer son exposé, Monsieur Xue Bing, Envoyé spécial du Ministère des Affaires étrangères pour la Corne de l’Afrique, a énuméré des réalisations qui portent la coopération sino-africaine au niveau de modèle dans le Sud global et de repère pour la révision de la politique africaine des puissances occidentales. Dans le domaine des échanges commerciaux, en 2025, le commerce entre la Chine et l’Afrique a atteint un nouveau record de 300 milliards de dollars, confirmant une croissance soutenue. La Chine reste le premier partenaire commercial de l’Afrique en seize années consécutives. Au sortir des assises de Changsha en juin 2025, la Chine a décidé de 100% d’exonérations douanières sur les produits agricoles des 53 pays africains avec lesquels elle entretient des relations diplomatiques. Ce qui a fait augmenter les exportations agricoles africaines vers la Chine de 600% en moyenne. Au même moment, les investissements directs chinois en Afrique ont dépassé les 45 milliards de dollars, avec une forte présence dans les secteurs de l’énergie, des transports et des télécommunications.
En 2025, la Chine a financé plus de 1400 projets d’infrastructures, incluant des routes, chemins de fer, ports, aéroports et centrales solaires. Dans les secteurs de la coopération éducative et technologique, plus de 50.000 bourses ont été accordées à des étudiants africains pour étudier en Chine. Des centres de recherche sino-africains ont été créés dans plusieurs pays pour favoriser l’innovation locale. La Chine a également lancé des programmes de formation en Intelligence artificielle et cybercriminalité pour les jeunes africains.
Quant aux domaines de l’agriculture et du développement durable, la Chine soutient plus de 200 projets agricoles en Afrique, axés sur la sécurité alimentaire et la résilience climatique. Des zones de coopération agricole ont été établies dans 15 pays africains, favorisant les transferts de technologie et les pratiques durables. En diplomatie et solidarité, 2025 a enregistré plus de 30 visites diplomatiques de haut niveau entre dirigeants chinois et africains.
La Chine a renforcé son soutien aux pays africains dans les forums internationaux, notamment sur les questions de climat, de réforme du système financier mondial et de santé publique. “Ces chiffres traduisent une coopération sino-africaine qui ne cessent de s’approfondir. Des relations fondées sur le respect mutuel, le développement partagé et une vision commune d’un avenir multipolaire” conclut Monsieur Xue.