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La CEMAC : une initiative d’intégration ambitieuse avec des enjeux divers

Salma Meftah/ étudiante chercheuse en droit et politiques de l’Union Africaine et stagiaire au Centre International des Etudes Stratégiques Sécuritaire et Militaire

La communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) est une organisation intergouvernementale africaine créée le 16 mars 1994 en vertu du traité instituant la communauté signée à N’Djamena au Tchad entré en vigueur en juin 1999 et révisé le 25 juin 2008 et qui englobe 6 Etats de la sous-région à savoir  le Cameroun, la République centrafricaine, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale et le Tchad.




Les racines de cette organisation remontent à la période coloniale avec la création de l’Union douanière équatoriale mise en place le 29 Juin 1959 dans les anciennes colonies de l’Afrique équatoriale française (AEF).

Mais concrètement, la CEMAC a été  créée sur les cendres de l’Union douanière et économique de l’Afrique centrale (UDEAC) instituée le 8 décembre1964.

Aujourd’hui,  elle se voit comme l’acteur clé de l’intégration dans la sous région.

Elle est bâtie dans le but de « promouvoir un développement harmonieux des États membres » et ce par la création de d’une Union Economique et une Union Monétaire (article 1er du traité constitutif de la CEMAC[1]).


Un organigramme tentaculaire :

Pour assurer son bon fonctionnement, la CEMAC se dote d’un arsenal d’institutions et d’organes énoncés par l’article 10 du traité révisé.

Organes de la CEMAC :

Les organes de la CEMAC sont au nombre de 7.

Le traité constitutif  les classe en organes de décisions et organes d’exécution financière.

La première catégorie englobe les 4 organes suivants :

La conférence des chefs d’Etat : Au sommet de la pyramide institutionnelle on trouve la Conférence des Chefs d’Etat, organe suprême de la CEMAC composé de tous les chefs des Etats parties.

Il  se réunit en session ordinaire une fois par an pour déterminer les politiques et les orientations générales de la communauté.

Mais il peut être convoqué pour une session extraordinaire à l’initiative de son président ou de deux de ses membres.

La présidence est rotative par ordre alphabétique pour la durée d’une année.

Le conseil des ministres de l’Union économique de l’Afrique centrale : le 2ème rang de la pyramide institutionnelle est occupé par le conseil des ministres de l’Union économique de l’Afriquecentrale. Il  se compose par des représentants des Etats membres, comprenant les Ministres en charge des finances, de l’intégration et des affaires économiques.

Comme son nom l’indique, il assure la direction de l’Union économique de la communauté.

Il se réunit 2 fois par an.

Le comité ministériel de l’Union économique de l’Afrique centrale: Le comité ministériel de l’Union économique de l’Afrique centrale est chargé d’examiner « les grandes orientations des politiques économiques respectives des Etats membres de la Communauté et en assure la cohérence avec la politique ».

Chaque Etat membre est représenté par deux Ministres, dont le Ministre chargé des finances, et ne dispose que d’une voix exprimée par ce dernier.

La commission : principal organe exécutif de la communauté, la commission est composée  de quatre commissaires, un président et un vise président.

La seconde catégorie, dite organes d’exécution financière est composée des organes suivants:

La banque des Etats de l’Afrique centrale : est créée en 1972 pour garantir l’intégration monétaire et la stabilité financière à ses 6 Etats membres.

Son siège social est à Yaoundé au Cameroun.

La Banque de Développement des Etats de l’Afrique centrale : Créée en 1975 et devenue opérationnelle en  1977, La Banque de Développement des Etats de l’Afrique centrale a pour mission la promotion de la croissance et l’intégration économique des Etats membres de la CEMAC.

Elle est financée par ses Etats membres égalitairement.

La Commission Bancaire de l’Afrique centrale : son siège est à Libreville au Gabon.

Elle dispose de pouvoirs divers :

-pouvoir administratif : la COBAC est chargée de délivrer des avis conforme dans les procès durs d’agrément et d’autorisation.

-Pouvoir réglementaire : définir le plan et les procédures comptables applicables à

L’établissement de crédits et des normes de gestion.

-Pouvoir de contrôle : veille à ce que la réglementation bancaire soit respectée par les établissements des crédits.

-Pouvoir de sanction : c’est un organe juridictionnel et peut intervenir a titre disciplinaire avec des sanctions comme ; l’avertissement, la suspension ou la révocation des commissaires aux comptes.

Les Institutions de la CEMAC :

Les institutions de la CEMAC, elles sont au nombre de cinq :

L’Union Monétaire de l’Afrique Centrale : l’Union monétaire de l’Afrique centrale forme la composante centrafricaine de la zone franc CFA qui constitue la monnaie unique des Etats membres de l’Union Monétaire de l’Afrique centrale et celle de l’Afrique de l’Ouest.

Le Parlement Communautaire : le parlement communautaire est fixé à Malabo au Guinée Equatoriale et composé de députés élus au suffrage universel pour un mandat de 5 ans.

Il est chargé du contrôle démocratique des Institutions, Organes et Institutions Spécialisées participant au processus décisionnel de la Communauté.

La CEMAC dispose de deux institutions de contrôle judiciaire qui ont remplacé l’ancienne Cour de justice bicamérale[1] :

La cour de justice communautaire : Située à N’DJAMENA au Tchad, la Cour de Justice Communautaire est le fruit de la réforme introduite le 25 juin 2008 par le traité révisé de la CEMAC.

Elle  est composée de 13 juges élisant parmi eux un Premier Président assisté de deux juges élus Présidents de Chambres.

 Le Premier Président assure la fonction de représentation de la Cour de Justice.

La Cour est subdivisée en deux chambres : Chambre Judiciaire et Chambre des Comptes.

Chacune d’entre eux dispose d’un greffe.

La Chambre Judiciaire est composée  de 6 juges proposés par les Etats membres et nommés par la Conférence des Chefs d’Etat pour un mandat de six ans renouvelable une seule fois.

 Pour être éligibles, les juges doivent, jouir d’une expérience et compétence professionnelle requises pour l’exercice d’une telle profession.

En plus de cela, ils doivent remplir les conditions de bonne moralité, d’indépendance et d’intégrité.

La Chambre Judiciaire est chargée du contrôle juridictionnel des activités des institutions et Organes de la CEMAC.

La Chambre des Comptes, elle aussi est composée de 6 juges proposés par les Etats et nommées par la Conférence des Chefs d’Etat pour un mandat de six ans renouvelable une fois. Ils doivent remplir les mêmes conditions d’éligibilité des juges de la chambre judiciaire.

La Cour des comptes communautaires : est créée en vertu de la convention de Libreville de 30 janvier de 2009 qui la régisse.

Elle est composée de 12 juges à raison de deux juges par Etat membre.

La première moitié doit avoir des compétences avérées en économie, finances et audit tant que l’autre moitié est réservée aux juristes.


 La Cour des comptes communautaires assure le contrôle des comptes des institutions des organes et des institutions spécialisées de la communauté.

Pour se faire, l’article 5 de la dite convention précise  qu’elle est une  « juridiction financière indépendante des Etats, des institutions, des organes et des institutions spécialisées »

Un champ d’action diversifié :

La CEMAC a été conçue dans le traité constitutif de 1994 comme étant une organisation « d’intégration économique et monétaire ».

Cet objectif ultime de la Communauté a été réaffirmé par le traité révisé de 2008.

Pour réaliser ses objectifs économiques la CEMAC a préparé un programme économique régional. 

La vision 2025 de la CEMAC :

Le Programme Economique Régional (PER) de la CEMAC intitulé « CEMAC 2025 : Vers une économie régionale intégrée et émergente » demeure la feuille de route qui oriente le travail de la communauté.

Il est exécuté par la Commission de la communauté.

La vision 2025 « constitue la réponse de la CEMAC pour sortir du peloton des pays pauvres et aller vers l’émergence économique » en faisant de la CEMAC « en 2025 un espace économique intégré émergent, où règnent la sécurité, la solidarité et la bonne gouvernance, au service du développement humain »

Pour se faire, la CEMAC a d’abord identifié les moteurs de la croissance de la communauté :

ENERGIE

AGRICULTURE ET AGROALIMENTAIRE

ECONOMIE FORESTIERE

ELEVAGE ET PECHE

MINES ET METALLURGIE

Ensuite, elle a fixé un agenda d’émergence :

La  1ère phase (2010-2015) : repose sur la construction des fondements de l’émergence.

La 2ème phase (2016-2025) : vise à faire de la zone CEMAC un espace économique harmonisé et émergent.

Une compétence pour la préservation de paix et de sécurité

Une bonne intégration économique ne peut pas avoir lieu dans un environnement secoué par les conflits et les instabilités politiques.

Cela a poussé les chefs d’Etats et du Gouvernement de la Communauté à décider d’intervenir pour mettre fin à des telles situations pour maintenir la paix et la sécurité dans la sous région.

 Le 2 octobre 2002, une Force Multinationale en Centrafrique (FOMUC) a été déployée dans la république centrafricaine sous l’égide de la CEMAC pour lutter contre l’instabilité chronique en Centrafrique.

Le 28 janvier 2004, les Etats membres de la CEMAC ont adopté un « Pacte de non agression, de  et d’assistance mutuelle » pour « instaurer un climat favorable au développement économique et social des pays membres de la communauté par le renforcement des liens de solidarité qui existent déjà dans le respect de leur souveraineté nationale ».

Par conséquent,  les États s’abstiennent de tout acte d’agression, de violation de souveraineté et s’engagent à apporter aide et assistance à l’un des Etats membres se trouvant devant un cas de trouble grave. Pour se faire, la conférence a décidé la création de :

Un Comité de défense et de sécurité composé des ministres des affaires étrangères, de la défense et de la sécurité et présidé par le pays qui assure la présidence de la Communauté.

 Le Comité est chargé du suivi  de l’application du Pacte.

Un Observatoire d’analyse et de prévention qui est l’organe de collecte et d’analyse des données relatives à la sécurité.

Une Force multinationale de la CEMAC, chargée d’accomplir des missions de paix, de sécurité et d’assistance humanitaire.

La Conférence est compétente pour décider de l’interposition de la Force multinationale. Elle entame les procédures appropriées de médiation entre les belligérants.

En réalité, le Pacte n’a fait qu’institutionnaliser la structure de force que l’organisation avait déjà mise en pratique deux années plus tôt.

La CEMAC : de hautes potentialités se heurtant à des défis majeurs !

Avec une superficie de 3 020 144 Km2, la zone CEMAC est sans doute parmi les zones les mieux dotées en richesses naturelles dans le continent africain.

Cela est dû à la diversité de ses traits morphologiques :

Des écologies sahariennes aux confins nord du Tchad

Des zones sahéliennes à l’extrême Nord du Cameroun et dans une partie du territoire tchadien

Des zones montagneuses et une importante frange côtière qui s’étend du littoral camerounais jusqu’au rivage de l’Angola 

Les forêts de l’Afrique centrale s’étendent sur plus de 200 millions

La localisation géostratégique avantageuse sur le centre du continent ainsi que ses richesses naturelles minières sont capables de lui offrir des opportunités rassurantes.

Or, la réalité dit le contraire du fait que quoique la région soit un géant énergétique du fait de ses ressources, elle n’est qu’un nain économique en termes de production.

Selon le rapport final[1] pour le PER rendu en octobre 2009 la communauté demeure en queue de l’indice de développement humain des Nations avec des faiblesses structurelles et des économies qui reposent sur un nombre limité de matière première notamment le pétrole.

D’ailleurs, le défi principal  pour les Etats membres de la CEMAC est d’exploiter la richesse pétrolière pour rehausser fortement la croissance en dehors du secteur pétrolier et faire reculer inclusivement et durablement la pauvreté.

Un autre défi majeur de préservation de paix et de sécurité dans une zone qui vit en paroi des instabilités politiques et des crises sécuritaires vient s’ajouter aux défis susmentionnés.

Ajoutons à cela que l’appartenance des 6 Etats membres de la CEMAC à d’autres communautés économiques à l’instar de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC) qui englobe 11 Etats impactent leurs engagements envers les objectifs de la CEMAC et éparpillent leurs efforts.

Mais la vérité dit que le succès de telles intégrations demande une volonté politique ferme, chose qui manque en Afrique centrale.


[1] CEMAC 2025 : Vers une économie régionale intégrée et émergente Programme Economique Régional 2010-2015  Volume 1 : Rapport final, adopté en octobre 2009, disponible sur : https://www3.nd.edu/~ggoertz/rei/reidevon.dtBase2/Files.noindex/pdf/a/PER%20Volume1.pdf

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